A l’occasion de la Journée Mondiale de l’ingénierie pour le développement durable du 04 Mars 2021, l’UNESCO a rendu public son deuxième rapport sur l’ingénierie. Élaboré en collaboration avec les deux entités chinoises: le Centre International pour l’Enseignement de l’Ingénierie (ICEE) et le Central Compilation and Translation Press (CCTP). Ce rapport témoigne du rôle crucial de l’ingénierie dans l’atteinte de chacun des 17 Objectifs du développement durables (ODD).

Composé de cinq chapitres, les auteurs du rapport ont veillé à émettre des recommandations qui peuvent servir de référence aux gouvernements, aux établissements de formation des ingénieurs ainsi que aux organisations d’ingénieurs. Le résumé exécutif de ce rapport en souligne les 20 plus importantes et les classe comme suit:

Comprendre le rôle de l’ingénierie et des ingénieurs dans la réalisation des ODD

1. Les gouvernements, les enseignants de l’ingénierie, l’industrie et les établissements professionnels d’ingénierie doivent encourager une meilleure compréhension du rôle critique que jouent les ingénieurs et l’ingénierie dans la création d’un monde plus durable.

Égalité des chances et diversité

2. Les gouvernements et les dirigeants devraient prendre des mesures urgentes pour encourager davantage de jeunes, en particulier les filles, à envisager une carrière dans l’ingénierie, afin de lutter contre le manque d’ingénieurs et garantir la diversité de raisonnement et la participation inclusive qui est essentielle à la réalisation des objectifs de développement durable.

3. Le secteur de l’ingénierie dans son ensemble devrait s’approprier la philosophie « ne laisser personne pour compte » des Objectifs de développement durable et veiller à ce que les solutions technologiques remédient aux inégalités actuelles.

L’eau, un enjeu mondial et stratégique

4. Il faut répondre aux défis mondiaux anticipés en matière d’eau liés aux conséquences de la pollution croissante de l’eau et des changements climatiques, tout en bénéficiant des progrès de la science, de la technologie et de l’innovation dans des domaines comme les modèles hydro-environnementaux, les systèmes d’aide à la décision, la microélectronique, la nanotechnologie, la chimie fine, la biotechnologie et les technologies de l’information.

5. La portée sociale et environnementale de l’eau potable et la dimension globale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 exigent une approche intégrée et systématique pour traiter les spécificités de chacun des 17 ODD dont la mise en oeuvre nécessite une analyse interdisciplinaire intensive et une expertise multisectorielle.

6. Les infrastructures techniques et naturelles doivent être combinées à des approches de gestion de l’eau impliquant l’engagement des parties prenantes et une adaptation climatique ascendante. Les ingénieurs doivent être formés aux récents progrès de l’hydrologie, qui s’entremêlent à des facteurs externes tels que la technologie et les besoins sociétaux, afin de développer des approches pour la mise en oeuvre des ODD et d’autres objectifs liés à l’eau.

Sensibilisation aux changements climatiques et résilience

7. Les pays peuvent identifier, comprendre et gérer les risques liés aux changements climatiques en donnant la priorité à la planification et aux mesures d’adaptation, notamment en mettant en oeuvre des procédures d’exploitation et de maintenance propres à prolonger la durée de vie des infrastructures qui : i) présentent un risque critique de défaillance ; ii) répondent à un niveau élevé de demande ; iii) atteignent la fin de leur cycle de vie ; ou iv) dépassent le niveau de tolérance au risque et nécessitent des investissements importants pour être remises en état ou remplacées.

8. Il est nécessaire d’accorder une attention particulière aux pays vulnérables en développement pour renforcer leurs capacités à fournir des infrastructures résistantes au climat, en actualisant leurs codes, normes et lignes directrices nationaux et en renforçant les capacités de leurs services climatiques, de leur ingénierie et leurs capacités d’exécution. Des financements publics et privés sont nécessaires pour investir dans des activités d’ingénierie pour la prévention et la réduction des risques de catastrophes, par des mesures structurelles et non structurelles afin de favoriser la résilience. La coopération couplée à la recherche en ingénierie devrait être recherchée pour identifier et fournir des solutions innovantes, y compris des solutions fondées sur la nature.

Ressources naturelles et énergies durables

9. Afin de contribuer à la réalisation des ODD, il est essentiel de développer des systèmes énergétiques durables et résilients. Les politiques et les faits nouveaux dans ce domaine doivent être basés sur des données factuelles rigoureuses et éviter les idées préconçues. Pour réaliser ces objectifs, toutes les options énergétiques sont à envisager, en fonction du contexte national. Il est important d’utiliser des critères économiques simples et transparents, tels que le coût par tonne de CO2 évitée.

10. Il convient de mettre en oeuvre et de développer des technologies appropriées pour parvenir à la durabilité dans le secteur minier.

Données, intelligence artificielle et villes intelligentes

11. Les gouvernements et les propriétaires de données doivent rendre les données trouvables, accessibles, interopérables et réutilisables de manière éthique.
Des règles et des normes doivent être élaborées sur la base d’un consensus mondial pour permettre un partage et un échange efficaces des données.

12. La sécurité et la confidentialité des données ont gagné en pertinence et doivent faire partie du processus de conception à tous les stades du paradigme des mégadonnées. Une coopération internationale et interdisciplinaire doit être mise en place entre les institutions académiques, les universités et le secteur industriel, ainsi que la société civile à travers le monde pour faire progresser l’innovation et les applications de l’IA pour la mise en oeuvre des ODD. Les gouvernements et la société civile doivent promouvoir le dialogue international afin de parvenir à un consensus mondial sur la gouvernance de l’IA et d’adopter des principes, des lignes directrices et des normes mondiales pour la conduite responsable de l’IA.

13. Les technologies et les applications de l’ingénierie intelligente modifient la nature et l’économie des infrastructures. De la nouvelle génération de transports et d’établissements de soins de santé aux infrastructures résistantes aux catastrophes et aux sources d’énergie à faible teneur en carbone, les villes intelligentes pourraient être des vecteurs d’innovation ciblée et des bancs d’essai pour de nouvelles applications et solutions.

Enseignement des sciences de l’ingénieur et renforcement des capacités en ingénierie au service des ODD

14. Le gouvernement, les enseignants des sciences de l’ingénieur, le secteur industriel et les établissements professionnels d’ingénierie doivent collaborer pour financer et appuyer des stratégies visant à accroître le nombre d’ingénieurs, à introduire une approche internationalement harmonisée des qualités des diplômés en ingénierie et pour promouvoir les compétences professionnelles continues afin de garantir qu’il y ait des ingénieurs de haute qualité pour la réalisation des Objectifs de développement durable. Ces repères doivent être reconnus partout dans le monde et former la base des systèmes nationaux d’enseignement des sciences de l’ingénieur pour la formation des ingénieurs ayant les bonnes compétences.

15. L’amélioration et le renforcement de l’enseignement des STEM à l’école est le fondement de l’enseignement des sciences de l’ingénieur au niveau supérieur et de l’apprentissage tout au long de la vie. En outre, le thème de la « durabilité » doit être intégré dans le programme de tous les établissements d’enseignement, des écoles et universités aux départements d’ingénierie et aux organismes de formation professionnelle.

16. Les gouvernements devraient davantage mettre l’accent sur les programmes interdisciplinaires, le développement durable et les compétences professionnelles, les combinant à des modèles de financement qui répondent à ces besoins. Des critères d’accréditation nationaux devraient être formulés et assortis de mesures d’incitations et de récompenses pour les établissements qui satisfont à ces exigences.

17. Les études devraient mettre l’accent sur la résolution de problèmes interdisciplinaires et complexes au moyen d’un apprentissage en ligne, centré sur l’apprenant et axé sur les problèmes.

18. Les institutions d’ingénierie, les industries et les universités devraient coopérer pour développer et mettre en oeuvre un système de certification professionnelle des ingénieurs pour la promotion de la formation professionnelle continue et la reconnaissance des qualifications et des compétences professionnelles des ingénieurs dans le monde entier.

Coopération régionale en matière d’ingénierie

19. Il est nécessaire de consolider la coopération interrégionale, régionale et sous-régionale, sous toutes ses formes, afin de renforcer les capacités en ingénierie conformément aux principes de développement durable, notamment en mettant l’accent sur les aspects liés à l’ingénierie dans tous les Objectifs de développement durable, ainsi que des normes inclusives, la mobilité des ingénieurs et l’articulation du lien entre l’ingénierie et l’enseignement afin de remédier aux déséquilibres actuels entre les capacités d’ingénierie et le développement économique dans les diverses régions du monde.

20. L’ingénierie est un secteur très diversifié, tant sur le plan éducatif que professionnel. Il y a donc lieu d’adopter une approche commune afin d’harmoniser les définitions et l’enregistrement des données, qui devraient également refléter les tendances de la diversité dans le secteur de l’ingénierie. Les institutions gouvernementales et les organisations d’ingénieurs devraient renforcer leur coopération afin d’harmoniser davantage les normes de collecte et d’étude des données de la profession.